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mardi 29 décembre 2015

Constantine, The Hellblazer, vol. 1 : Going down

 
Contient les épisodes #1-6 de la série Constantine : The Hellblazer (2015)

Début d'une nouvelle série récurrente, ces épisodes sont malheureusement inégaux dans leurs dessins. Si l'on peut se satisfaire de certaines prestations, j'ai regretté la valse des dessinateurs dont certains qui enlaidissent franchement le beau John Constantine. Cependant, l'histoire tient la route. Les fantômes de John Constantine, ceux qu'il a fait souffrir ou qu'il n'a pas su aider, meurent définitivement les uns après les autres, dévorés par une créature mystérieuse autant qu'effrayante. Il doit retourner au Royaume-Uni en quête de son passé et éclaircir ce mystère. Des épisodes globalement bien menés même si certaines planches, ratées tant sur le plan du découpage, de la narration que sur le plan de l'écriture pure, gâchent un peu le plaisir et alourdissent une lecture qui aurait gagnée à être davantage fluide.
En somme, on se divertit moyennement dans ce comics qui n'apporte pas grand-chose et reste outrageusement puritain quand on espérait du Hellblazer bien plus osé. Loin de créer la polémique, gageons que ce comics conformiste contrairement à ce qu'il devrait être, passera globalement inaperçu. Ceci est fort dommage car malgré ses faiblesses, le scénariste a quelques fulgurances notamment dans le comique du dernier numéro.



À rebours par Huysmans

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Des Esseintes est un dandy, un misanthrope qui vit seul (avec ses domestiques) dans sa propriété et qui ne se soucie pas du monde extérieur. Vous cherchez un livre politique ? Le voici. Un livre sur la politique ? Passez votre chemin. Dans ce roman, Joris-Karl Huysmans nous livre avec un grand talent un ouvrage sur la décadence. Le protagoniste ne s'intéresse qu'à ses livres, à sa décoration intérieure. Il trie, range, ses ouvrages de (haute) bibliophilie, se plaint d'auteurs contemporains, admire les décadents, les Baudelaire, les Pétrone, lit les auteurs sombres, les Poe, les Villiers-de-l'Isle-Adam, s'enchante devant la prose de Flaubert et sa critique de la bêtise contemporaine, la bêtise bourgeoise qui contamina le clergé.
Huysmans, dans un style un peu pompeux il est vrai, mais ô combien riche en vocabulaire, que ce soit au niveau des couleurs, des matières, et autres, sent venir le déclin de son pays, de l'Occident en ce XIXe siècle miné par la IIIe République, par les « affaires ». Du coup, que faire ? refaire sa déco nous dit Huysmans. Tapisser telle pièce de maroquin, s'acheter une tortue pour décorer un tapis puis faire dorer et incruster de pierreries la carapace de celle-ci, se procurer des fleurs, etc. Et à chaque geste, Huysmans nous régale des pensées intérieures de des Esseintes.
Un roman décadent qui voit la fin d'une époque, la fin d'un monde, comme plus tard chez Proust. Un régal à la lecture, une œuvre jouissive et sombre à la fois. Un véritable chef-d’œuvre de la littérature.


mercredi 23 décembre 2015

Platform (Zhangke Jia, 2000)

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J'ai commencé à regarder ce film sans avoir lu le synopsis et, si j'ai deviné l'intrigue, ce fut avec grand peine. En effet, l'enchaînement des scènes peu bavardes, plus contemplatives qu'autre chose, ne facilitent pas la compréhension du message. Après avoir lu le synopsis, me révélant que le film se déroule sur dix ans et qu'il s'agit du glissement de la Chine de Mao vers une Chine américanisée, j'ai pu, consciemment, mieux appréhender le message du réalisateur.
Si le message global est assez transparent — on voit la troupe qui fait l'éloge de Mao au début du film puis au fur et à mesure s'occidentalise à outrance — ce qui m'a le plus manqué, c'est soit une critique de cette évolution, soit une constatation plus forte. Il semble que le réalisateur n'ait pas eu le parti pris de la critique, il  voulait simplement montrer le glissement, mais ce glissement ne semble pas se faire totalement en douceur (tout d'un coup, lors d'une scène, le groupe joue du rock sans qu'on ait vraiment eu une étape avant). Rien ne semble justifier l'occidentalisation de la Chine dans ce film.

Cependant, avant que l'on croie à une critique contre le film, il me faut préciser que malgré la lenteur, malgré l'enchaînement de scènes manquant en apparence de liant, on ne s'ennuie pas, on est assez fasciné par ce film pour des raisons que je saurais expliquer, intellectualiser. On se laisse porter sur ces 2h30 par Zhangke Jia et ses personnages, on voit ces jeunes qui évitent la Chine terrible, celle de la pauvreté et des mines, qui fument, qui boivent, comme s'ils tentaient d'oublier leur pays, les idéaux de Mao. Cela commence par une femme qui change de coiffure et qui devient comme ces danseuses de flamenco et cela finit par le rock, en passant par des chansons courtes qui vont à l'encontre des idéaux maoïstes. Ce film est très subtil mais peut-être l'est-il trop et du coup le message pourrait s'effacer derrière cet aspect documentaire qui n'a pas de parti-pris politique ; un simple suivi sur une décennie d'une bande de jeunes artistes chinois. C'est peut-être là la force du film : la banalité de l'occidentalisation de la Chine.

Le hussard sur le toit par Jean Giono

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Cela faisait bien longtemps que je ne m'étais pas replongé dans l'univers de Giono (depuis 10 ans à vrai dire !) et quelle bonne surprise que cet ouvrage. Jean Giono nous raconte l'histoire d'Angelo, un combattant révolutionnaire italien exilé après un duel. En Provence, il fait face au choléra qui décime la population. Personnage héroïque et inconscient, sorte d'être romantique de l'époque, Angelo vit de multiples aventures dont une sur les toits de Manosque.
Le style est étonnant et je n'adhère pas toujours, notamment dans l'enchainement de brèves scènes qui font plus penser au théâtre qu'au roman. Cependant, loin s'en faut, ce livre est grandiose sur plusieurs points ; il est puissant sur le plan descriptif, les descriptions du choléra par Giono sont légendaires ; il est intéressant sur le plan des pensées intérieures du protagoniste, révélatrice d'une époque d'action (le XIXe siècle) et d'écriture (le XXe siècle). Un parti pris stylistique fort pertinent est celui du passage du discours indirect au discours indirect libre puis au discours direct, c'est-à-dire que Giono dit ce que raconte le personnage puis au fur et à mesure qu'il narre les déclarations, on en vient au "je". Cela pourrait donner par exemple : "Il fit sa critique sur Le hussard sur le toit. Un grand livre n'est-ce pas ? Probablement le Giono que je préfère jusqu'ici." Cela donne un souffle à l'ouvrage qui malgré tout, dans l'avant-dernier chapitre, se perd un peu dans le long monologue qui le caractérise et qui n'est pas, à mon sens, particulièrement justifié.
Un ouvrage que je conseille aux amoureux de la littérature et la Provence, aux curieux, et à ceux qui s'intéressent aux fléaux qui touchèrent nos ancêtres dont le choléra, personnage omniprésent de ce classique.